Les élections européennes sont déjà dans le passé, mais le résultat est si triste qu'il fallait prendre un peu de temps pour reprendre son souffle et tenter une modeste analyse.
Le FN fait 11 points de moins à Lamorlaye que dans l'Oise ; l'UMP équilibre le FN sur Lamorlaye en récoltant 11 points de plus chez nous que dans l'Oise. Faut-il se réjouir d''être une ville "UMP" ?
Et, toujours à Lamorlaye, l'ensemble de la gauche avec les verts représentent, malgré l'abstention record, 18,6% : les européennes ne motivent pas mais ça motivent mieux à gauche que les municipales ! Vieille rengaine !
Au niveau de l'Oise d'où vient ce différentiel énorme par rapport aux résultats de 2009 : +26 pour le FN, -6 pour l'UMP,-9 pour la gauche ? Il faudrait comparer Lamorlaye en 2009 et en 2014 : en 2009, l'UMP y avait totalisé 46% des votes et il y avait eu 39% de participation. Il faudrait compléter avec la gauche mais je n'ai pas l'ensemble des chiffres sous la main pour l'instant ; moins de 3% pour le Front de gauche ; 8,5% pour le Modem ; 12% pour Europe Ecologie : avec l'autre liste écologiste (et oui ! il y avait 2 listes vertes concurrentes!) on arrivait à 16% : à eux seuls, presque ce que totalise l'ensemble de la gauche aujourd'hui !
Mais peut-être s'agit-il plus d'un mouvement dans la masse des abstentionnistes : ceux de 2009 ne votant pas parce que le FN sentait encore trop clairement le soufre et ceux de 2014 ne votant pas pour bien signifier à la gauche leur déception et leur angoisse. Car avec plus de 55% d'abstention à Lamorlaye (presque 57% en France) les résultats ne sont pas représentatifs de la force du FN mais plutôt de la non pertinence du discours des autres partis.
Je recopie ci-dessous un article très intéressant et de bien plus haut niveau sur le même sujet : Confrontations est un Think tank créé en 1991 par Philippe Herzog, un ancien du PCF qui a participé à l'élaboration du programme commun de la gauche ; c'est ce type de référence qui fait que l'on est jeune ou pas... Ce temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître étaient, malgré la guerre froide, plus rassurant que celui d'aujourd'hui. Les bons et les méchants étaient clairement identifiés et on se trompait avec enthousiasme !
Bref, Confrontations est issue de cette histoire et la tire vers le haut en faisant dialoguer des gens de partis et de conceptions opposés mais tous très "européens".
Les noms choisis à peu près à la même époque, "Confrontations" en 1991 pour cette association, "Convergences" en 1995 pour notre journal, peuvent faire réfléchir (on en avait beaucoup discuté avant la sortie de notre premier journal)... Qu'est ce qui est plus efficace ? Et qu'est ce qui était, ou est, possible à notre niveau ?
From: yfischer@confrontations.org
To: luciennejean@hotmail.com
Subject: STOP A L’IRRESPONSABILITE. Un article de Philippe Herzog et Claude Fischer
Date: Mon, 26 May 2014 19:12:55 +0200
La réaction de Philippe Herzog et de Claude Fischer
Vingt-cinq ans d’engagement quotidien pour construire l’Europe nous ont appris la beauté et la difficulté de la tâche. Les élections du 25 mai renforcent notre détermination, celle de nos amis de Confrontations Europe. Elles sont un signal que tous les Européens de bonne volonté doivent saisir impérativement.
Elles témoignent du trouble profond et du manque de responsabilité de nos sociétés et de leurs partis nationaux, et non d’un rejet de l’Europe. Les europhobes ont progressé mais les sondages confirment qu’une large majorité de nos concitoyens reste attachée à l’idée que nous avons besoin de l’Union pour faire face aux défis actuels. Par contre, l’ampleur de l’abstention souligne une désaffection et une négligence, et la baisse des partis de gouvernement – sauf dans quelques pays comme en Allemagne ou en Italie – le désarroi face à la médiocrité ou l’indigence de leur offre politique. Nous enrageons de voir le potentiel humain et civique être aussi étouffé par les carences de la représentation politique et, en sous-jacent, des systèmes éducatifs et informationnels nationaux.
La France apparait comme l’enfant malade de l’Europe. Le Front national en tête : c’est une honte autant que la confirmation de la crise de notre démocratie. Personne n’attendait vraiment de réponse de nos partis aux enjeux actuels de construction de l’Europe ; et malheureusement sur ce point et pour la plupart nous n’avons pas été déçus. Pire, au soir des résultats ils persévèrent. L’UMP en morceaux se hâte de s’interroger : comment se préparer à la présidentielle de 2017. Les grands medias font la mouche du coche et détournent l’opinion vers cet horizon. Le secrétaire général d’un Parti socialiste qui s’est contenté d’appeler à voter pour Martin Schultz, et que les électeurs ont violemment sanctionné, a le culot de continuer à faire de l’Union européenne le bouc émissaire des politiques d’austérité, et de ce fait, de la montée du Front national. Plus digne, le Premier ministre, choqué, reconnait la responsabilité des gouvernants successifs mais sans appeler à approfondir la réflexion. La décomposition de la représentation politique et la crise institutionnelle sont graves, et l’immaturité de la jeunesse et de la société appellent aussi l’attention. Nous envoyons au Parlement européen une vaste fournée de gens qui veulent détruire l’Union. Avec qui va travailler l’Allemagne ? Comment prétendre donner des leçons aux autres ? Même les candidats europhiles qui ont pu avoir accès à la parole médiatique n’ont pas su faire comprendre et aimer l’Union.
La grande nouveauté proposée aux électeurs, contribuer indirectement au choix du futur président de la Commission, est un échec. Les projets n’étaient pas là. La formule ne séduit pas et elle débouche sur l’indécision. Tant mieux. Faire appel au clivage gauche-droite, alors que l’Union repose sur la pluralité et l’esprit de coopération, alors qu’elle est si fragile, c’est un leurre dangereux. L’obsession gauche-droite est une paresse de l’esprit et une confusion entretenue entre démocratie nationale et démocratie européenne plurinationale. D’ailleurs celle-ci, qu’il faut certes conforter par la participation, vaut bien en l’état avec sa recherche de compromis, celle de nations comme la nôtre, où les postures exacerbent terriblement les divisions et l’irresponsabilité du public. Souhaitons que le Conseil soit sage et propose des hommes d’envergure et de responsabilité non partisans comme Michel Barnier ou Pascal Lamy, capables de coaliser les forces démocratiques sur une perspective. Car demain nous avons besoin d’une Commission réhabilitée et réformée pour servir l’intérêt général.
Cette Europe en danger de stagnation économique et de crise institutionnelle va plus que jamais avoir besoin de tous ceux qui dans la société civile sont engagés. Les partis et leurs élus doivent impérativement se tourner vers eux pour affronter les défis, éduquer et impliquer les jeunes et les citoyens. Dans l’immédiat, mobilisons les Européens de bonne volonté pour que les institutions communautaires adoptent un plan d’action ciblant sans détour les grands chantiers : construire les fondations et les moteurs d’investissement pour mobiliser les sociétés vers la formation, l’emploi et une croissance durable. Briser la fragmentation dont sont victimes de nombreux pays d’Europe notamment au Sud et à l’Est. Renforcer l’eurozone mais aussi l’Union à 28 par un nouvel acte d’intégration du grand marché, une politique extérieure, des solidarités nouvelles.
Ces tâches exigent la participation. Celle-ci exclut toute complaisance envers une représentation nationale abimée, au contraire elle nécessite une détermination sans faille pour les réformes. Elle fait plus que jamais appel à une volonté ardente d’entente nationale et européenne.
Claude Fischer et Philippe Herzog
Présidente et Président fondateur de Confrontations Europe
Présidente et Président fondateur de Confrontations Europe
Cet article sera aussi publié par Huffington Post, le 27 mai 2014.
1 commentaire:
J'étais ces jours derniers en Bavière pour des raisons semi professionnelles et j'ai été surpris de voir à chaque coin de rue, sur de nombreux poteaux, feux rouges et panneaux publicitaires des affiches appelant à voter pour Martin Schulz, originaire d'ici. Ca m'a surpris car la Bavière n'est pas connue pour ses positions de gauche.
Pour arriver en Bavière, j'ai traversé en voiture la vallée de la Ruhr ou fleurissaient à de nombreux détours de virage le visage souriant, rassurant d'Angela Merkel "Mutti", qui n'est pas du même bord.
En tout cas, ce qui m'est resté de ce voyage, c'est la sensation que les allemands ont accordé beaucoup plus d'importance à ces élections que nous ne l'avons fait. A chaque coin de rue une affiche, un portrait venait nous rappeller qu'un vote était attendu et qu'il était déterminant.
En discutant avec des collègues à Paris (en retirant ceux qui ont votés pour MLP) , certains m'ont dit, "ah il y avait des élections ? Mais ils n'en ont pas parlé" sous entendu à la télé, radio, sur internet.
Je ne cherche pas d'excuse au raz de marée de Marine Le Pen, juste, je voudrais mettre en avant que le manque de participation a contribué à la positionner en tête et que le manque de débat et de publicité a alimenté une abstention record.
Une fois que j'ai dit tout ça, qu'est ce que je peux proposer, qu'est ce que nous pouvons, devons proposer ? Je ne sais. Je proposerais de rétablir un dialogue éteint, où chacun expose, partage, débat de ses convictions. La parole, le débat nous libèrera, j'espère. Surement pas l'enfermement sur soi même.
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